Soigner après le froid

●    Pour compléter le chapitre concernant la protection des palmiers contre le froid, il m'est apparu indispensable de rédiger aussi un article traitant des soins à apporter à un palmier qui a subit le froid.    En effet, bien peu des nouveaux amateurs de palmiers, ont la chance d'habiter une zone naturellement protégée.

    Comme me l'a récemment confié un correspondant qui venait de perdre son palmier, «on apprend de ses erreurs...», ce qui est tout à fait vrai.    Si cet article permet donc de sauver ne serait-ce qu'un seul palmier, ce sera déjà pas si mal.

●    Aux professionnels qui lisent ces lignes, car je sais que cela arrive fréquemment, je rédige volontairement cet article d'une façon très schématique et caricaturale, pour qu'un maximum d'amateurs puissent à peu près comprendre ce qui se passe.    Ceci dit, il est tout à fait possible de me proposer une correction pour le cas ou une erreur trop flagrante se glisserait dans cet article, ou sur le reste du site d'ailleurs, je rappelle que je ne suis moi même qu'un amateur, et bénévole en plus.

 Pourquoi ?

●    Que se passe t'il quand il fait froid ?

    Tout le monde connaît le vieux truc de la bouteille pleine d'eau, bouchée, que l'on oublie dans le congélateur...    L'eau augmente de volume lorsque qu'elle se transforme en glace quand la température passe en dessous de 0°, et, ne pouvant s'échapper par le goulot qui est bouché, fait éclater la bouteille sous l'effet de la pression.

    Le principe est ici un peu le même.

    Un palmier, comme tous les êtres qui peuplent la terre, est constitué de cellules vivantes qui se reproduisent.    Ces cellules ont une résistance particulière contre le froid.    Constituées en grande majorité d'eau, elles éclatent sous l'effet du gel et meurent:

- De plus, en fonction du genre du palmier, la résistance au froid peut être très différente.    Par exemple, entre un Palmier de Chine et un Cocotier la différence de résistance au froid est de l'ordre de 30°.

- Enfin, sur le même palmier, les cellules qui constituent le stipe ou celles qui constituent les palmes, ou bien encore celles qui constituent le cœur du palmier, ont une résistance au froid très différente.

    Disons que les cellules les plus fragiles sont les cellules des racines et les cellules du cœur, ensuite viennent les cellules des palmes, les plus résistantes étant les cellules du stipe (le tronc).

    Les fragiles cellules des racines sont bien protégées, car les racines sont dans la terre, et il faut vraiment qu'il fasse très très froid pour que le sol gèle en profondeur.    Attention donc aux palmiers en pots, car il n'y a jamais beaucoup de terre dans un pot, ce peu de terre peut donc geler très vite et les racines avec.

    Les fragiles cellules du cœur sont elles aussi bien protégées, car le cœur est enfoui profondément dans le tronc du palmier, qui lui résiste bien au froid.

    Enfin, les palmes, plus ou moins résistantes au froid suivant la famille du palmier, ne sont naturellement pas protégées du tout.    Voila pourquoi, même si les cellules des palmes sont globalement moins fragiles que celles du cœur, ce sont les cellules des palmes qui "brûlent" en premier.    Voila encore pourquoi, même lorsqu'un palmier a toutes ses palmes "brûlées" par le froid, cela ne veut pas dire que le palmier soit mort.

    Si le froid se prolonge, ou si la température descend en dessous du seuil de tolérance du palmier, le froid va finir par gagner l'intérieur du palmier.    Dans ce cas, le cœur va lui aussi souffrir et voir ses cellules geler, en partie, ou complètement.

    Suivant la famille du palmier, et donc sa résistance globale au froid, un palmier peut très bien mourir de froid, palmes et cœur compris, en l'espace d'une seule nuit, voire même en quelques petites heures.    Par exemple, des dizaines de milliers de Phoenix canariensis meurent tous les hivers en France, au bénéfice des grandes surfaces et autres enseignes de jardineries, qui les vendent, disons le tout net, comme plantes jetables.

 Que Faire ?

●    Je ne vais pas revenir ici sur « Que faire avant... », voyez pour cela le chapitre « Protéger du Froid ».    Non, nous allons voir maintenant ce qui peut éventuellement être fait pour tenter de sauver un palmier après qu'il ait gelé.

●    IMPORTANT, 1ère précision car on me le demande souvent, ON NE DONNE PAS D'ENGRAIS à un palmier qui est mal en point, que ce soit suite à une maladie ou à cause du froid, en pensant que cela va lui faire du bien.    L'effet serait même inverse, le choc provoqué pouvant être fatal.

●    1 - OBSERVER:    La première chose à faire est une mise en observation du Palmier.    En règle générale, les dégâts sur un palmier qui a gelé mais pas trop sévèrement, ne sont pas forcément visibles tout de suite.    Il peut y avoir plusieurs jours de battement, voire même plusieurs semaines entre le froid et l'apparition des dégâts.    Par contre, j'ai chez moi constaté que, plus le délai est long entre le froid et l'apparition des dégâts, meilleures sont les chances de récupération du palmier.    Ceci veut dire que, lorsque l'on sait qu'il a fait très froid, il faut inspecter régulièrement, pendant plusieurs jours, plusieurs semaines, son ou ses palmiers, et ne pas se contenter d'une simple inspection de routine en se disant « Il n'y a rien, tout va bien ».

    Le signe le plus évident qu'un palmier a gelé à 100% est qu'il peut être devenu totalement brun et sec.    Normalement, à ce stade, les chances sont minces, et il est hélas probable que le Palmier soit mort.    Par contre, si le palmier garde encore de larges zones vertes, par exemple à la base des palmes, rien n'est garanti, mais disons simplement que tout espoir n'est pas perdu.

    D'autres signes, moins flagrants ceux là:    Sur certaines palmes, ou même seulement sur un partie de certaines palmes, on observe que la couleur verte habituelle a perdu de son éclat, devient pâle, blanchâtre, que l'aspect brillant a disparu, ou encore les mêmes symptômes, mais visibles uniquement sur la lance du palmiers.    Là encore, on voit que le palmier a souffert, mais il est raisonnable de penser qu'il peut s'en remettre.

●    2 - TESTER:    Tester le coeur, c'est la deuxième chose à faire, et probablement une des plus importantes.    Pour les palmes brûlées, il n'y a plus rien à faire, elles ne redeviendront jamais vertes.    Au contraire, elles vont sécher, brunir, il ne reste plus qu'à attendre les beaux jours pour les couper.    C'est le cœur qu'il faut tester, car si le cœur est vivant, le palmier peut être sauvé, s'il est complètement brûlé, c'est fini, le Palmier est mort.    Les palmiers à plusieurs stipes, comme le Chamaerops humilis entre autre, peuvent avoir plus de chances.    Ces palmiers ont autant de cœurs qu'ils ont de stipes, ce qui fait que les stipes se protégent les uns les autres, et que certains peuvent avoir eu moins froid que d'autres.

●    COMMENT TESTER le coeur d'un palmier.    Je parle ici d'un palmier jeune dont la lance est accessible à pied d'homme.    Pour tester le cœur, on prend fermement la lance du palmier en main, et on tire dessus parallèlement au tronc, comme pour essayer de la retirer.    La force que l'on y met doit rester très raisonnable, on cherche seulement à tester la résistance de la lance, pas a déraciner le palmier.    Pour les Palmiers âgés qui ont un stipe de plusieurs mètres de hauteur, les choses sont plus difficiles, voire parfois impossibles sans faire appel à un professionnel, car dans ce cas, il faut monter dans le Palmier en se frayant un passage entre les palmes pour atteindre la lance.    Pour certains palmiers aux pétioles couverts d'épines ou aux folioles aiguisées comme des couperets, cela peut s'avérer une intervention très dangereuse.

    A partir de là, deux cas de figure:    Soit la lance tient bon, soit elle se détache et nous reste dans la main.

a - SI LA LANCE TIENT BON:     C'est plutôt bon signe.    Dans ce cas, je pense qu'un traitement à base d'un fongicide systémique (voir ci-dessous) par arrosage au pied du Palmier suffit, et comme je le disais précédemment, on refera un nouveau test dans quelques jours.    Je pense aussi qu'on peut couper les palmes grillées, elles ne servent plus à rien.

b - SI LA LANCE SE DÉTACHE:     C'est forcément moins bon, c'est le signe que le cœur avait bel et bien commencé à geler.    S'il n'a pas gelé totalement, le coeur n'est pas mort et pourra produire de nouvelles palmes aux beaux jours, mais s'il a gelé complètement, alors le cœur est mort, et petit à petit l'ensemble du palmier va sécher et mourir.

 Le Remède

●    3 - TRAITER:    Le traitement suivant n'est valable que si le cœur du palmier est encore vivant, et comme j'entends déjà les questions : « Comment savoir si le cœur de mon palmier est encore vivant ? », je réponds de suite qu'hélas, je n'ai aucune méthode, aucun truc, pour le savoir.    Comme je le disais plus haut, plus le Palmier est vert, plus il y a de chances, à l'inverse plus il est marrons moins il y a de chances.    Ce qui fait que dans le bénéfice du doute, on peut quand même essayer le traitement.

●    Lorsqu'une partie des cellules du cœur ont gelées et sont mortes, cela va inévitablement engendrer l'apparition, sur ces cellules mortes, d'un ou de champignons parasites.    Au départ, on ne peut observer ces champignons qu'au microscope, ou parfois à l'œil nu lorsqu'ils sont suffisamment denses, mais rapidement, leurs effets deviennent flagrants et bien visibles quand les cellules mortes changent de texture et de couleur, devenant molles et virant au blanc, vert, marron ou noir...    C'est ce que l'on appelle communément «de la pourriture» ou «de la moisissure», et si l'on met le nez sur l'extrémité de la lance qui était encore attachée au cœur il y a quelques instants, l'odeur qui s'en dégage est plus ou moins âcre.    Si on ne l'arrête pas, ce champignon va se développer et petit à petit s'attaquer au reste du cœur du palmier, en faisant moisir les cellules qui sont encore vivantes.    A la fin du processus, je le rappelle, c'est la mort du coeur, et donc la mort du palmier.

●    Pour éviter cela, on utilise un fongicide systémique.    Un fongicide n'est pas du tout un produit spécifique aux Palmiers, on trouve des fongicides de toutes marques dans toutes les jardineries.    Un fongicide est un produit phytosanitaire qui détruit les champignons, et la destruction des champignons va stopper la moisissure.    C'est là sa seule action, donc ce produit peut être utilisé pour diverses maladies liées à l'apparition de champignons sur toutes les plantes.    Que l'on s'entende bien sur une chose, un fongicide n'est pas un médicament qui va soigner le palmier et faire qu'il ira mieux ensuite, ça n'est pas un fortifiant.    Ça tue les champignons et stoppe la moisissure, c'est tout.    Si le Palmier est faible, que l'Hiver n'est pas fini, il faut le protéger des agressions jusqu'à ce que des jours meilleurs reviennent, le fongicide ne lutte pas du tout contre ça.    Le mot systémique s'utilise pour les produits phytosanitaires véhiculés par la sève, ce qui leur permet d'agir au niveau de tous les organes de la plante.

●    Personnellement, j'utilise l'Aliette Express J, mais c'est le Topsin qui m'a été conseillé par une productrice de palmiers, car il serait plus efficace.    Hélas, je ne l'ai jamais trouvé dans le commerce.    J'ai toujours obtenu de bons résultats avec l'Aliette Express J, et celui-là, on le trouve dans pratiquement toutes les jardineries.    Si on ne trouve pas précisément ce produit, on peut en essayer d'autres marques, simplement, je me répète, il faut un fongicide à effet systémique.

●    Comment utiliser l'Aliette Express J, ou un autre fongicide ?    Une fois que l'on a retiré la lance du palmier, cela créé un trou à l'extrémité du stipe.    Pour un effet rapide et ciblé, je conseille de verser, suivant la taille du palmier, l'équivalant d'une demi cuillère à café pour un petit Palmier, à une cuillère à café pour un Palmier plus grand, d'Aliette Express J en poudre, sans la diluer donc, directement dans le trou.    Pour que cela soit plus facile, on peu s'aider avec un entonnoir.    Ensuite, l'idéal est de mettre un petit dispositif sur le trou pour éviter qu'il ne se remplisse d'eau de pluie, je rappelle que le cœur des palmiers n'apprécie pas le contact prolongé avec l'eau ou l'humidité.    Ceci me permet de répondre à une autre très fréquente question, dans ce cas précis, je conseille de ne pas couper les palmes même celles qui sont grillées, car après le traitement, on peut les relever et les nouer au dessus du trou, pour obtenir une protection naturelle contre la pluie...

●    Si la lance ne s'est pas détachée lorsqu'on a tiré dessus, dans ce cas, on peut faire un traitement "préventif" normal, en diluant une dose de fongicide dans l'arrosoir, puis on arrose normalement au pied du palmier.    Je ne donne pas de dosage, comme tous produits phytosanitaires, il est recommandé de suivre les indications prescrites sur l'emballage.    Il faut également éviter d'asperger la zone du cœur du palmier.

●    Maintenant, il n'y a plus qu'à attendre.    Oui oui, je vous ai bien entendu au fond: « Et combien de temps faut-il attendre... ? », je réponds, comme disais l'autre, un certain temps.

    Cela prend de toute façon plusieurs semaines, voire plusieurs mois, tout dépend dans quel état se trouvait le cœur, brûlé à 20% ou à 80%, de la météo, de la région dans laquelle on vit, de l'emplacement du palmier dans le jardin...    Il n'y a pas un temps prédéfini, disons qu'en général, dans les 30 à 60 jours qui suivent le traitement, on doit voir une nouvelle lance sortir du trou.    Pour certains Palmiers peu attaqués, cela peut être bien moins, et parfois cela peut être plus long.

●    Suivant l'état dans lequel se trouvait le cœur, les premières palmes émises peuvent avoir une taille plus petite et une forme très bizarre, il se peut même que la nouvelle lance ne sorte pas par le trou de l'ancienne lance, mais sur un coté du palmier.

●    Parfois, il arrive que, même avec un cœur mort, le palmier garde pendant plusieurs mois une certaine quantité de palmes plus ou moins vertes, ce qui laisse son propriétaire plein d'espoir, mais il n'en créé plus ne nouvelles, et quand ces palmes survivantes auront terminé leur cycle de vie, ce sera terminé.